Terre-Neuve, une province que les Anglophones appellent « The Rock » (la roche), n’est peut-être pas connue pour ses terres agricoles, mais elle l’est pour sa créativité culinaire et sa capacité à tirer le meilleur parti des ressources du littoral atlantique. Lorsque la School Lunch Association, un fournisseur de services alimentaires sans but lucratif situé sur la presqu’île Avalon, a décidé de se joindre au mouvement des aliments locaux, elle savait qu’il y aurait des obstacles à franchir.
Les laboratoires d’apprentissage en approvisionnement d’aliments locaux offrent une façon innovatrice de surmonter ces obstacles. Inspirés du modèle de l’organisation américaine School Food Focus, ces laboratoires réunissent les intervenants clés afin qu’ils puissent définir leur vision et leurs objectifs. Ils parviennent ensuite à un consensus sur un certain nombre d’actions prioritaires pouvant être menées concrètement dans un court délai.
Parmi leurs principaux avantages, les laboratoires d’apprentissage sont à l’image de la collectivité dans laquelle ils se trouvent. Ce reflet fidèle de la collectivité commence quand on nomme « champions » les personnes qu’on perçoit comme étant les acteurs du système alimentaire scolaire. Dans chaque collectivité, on inclut un ensemble de personnes et de rôles différents en fonction des relations, de l’histoire, des valeurs et des aspirations de chacun.
Au Canada, trois districts scolaires très différents ont mis sur pied un laboratoire d’apprentissage. Le Vancouver School Board, un grand district scolaire urbain, a lancé le premier en 2013, suivi de la communauté isolée de Haida Gwaii, dans une région surtout autochtone située près de la côte nord de la Colombie-Britannique. Sur la côte atlantique, c’est sur la presqu’île Avalon, à l’est de Terre-Neuve, qu’on a lancé un laboratoire d’apprentissage en 2014. Étant les pionniers de cette méthode mobilisatrice particulière, ces laboratoires ont aussi rapproché et unifié ces trois collectivités, qui se sont autoformées entre elles et qui s’échangent maintenant leurs idées et leurs stratégies.
Après la tenue de la première réunion du laboratoire d’apprentissage de Terre-Neuve à St. John’s, le groupe ne savait pas encore trop à quoi s’en tenir. Cette incertitude est typique lorsqu’on essaie de s’attaquer à une chose qui paraît extrêmement complexe. Cependant, à la fin de la deuxième réunion, les idées proposées avaient créé un engouement et un optimisme parmi les membres du groupe. Ces derniers avaient reconnu que le laboratoire leur offrait l’occasion de concrétiser des mesures essentielles auxquelles ils songeaient depuis longtemps, mais n’avaient pas eu le temps de lancer. Tous les participants étaient reconnaissants de la structure et de la direction assurées par Food First NL pour les aider à donner corps à leurs idées.
À l’issu d’une journée bien remplie d’exercices d’établissement de vision et d’objectifs, des mesures concrètes avaient été décrites (voir l’encadré). Le groupe tenait aussi à recueillir des données de référence sur l’achat d’aliments ainsi qu’à analyser et à adapter les menus afin d’y intégrer des fruits, des légumes et des produits saisonniers de Terre-Neuve. La bonne nouvelle, c’est que les fournisseurs étaient déjà convaincus. Les aliments locaux étaient devenus très à la mode et les fournisseurs s’attendaient à ce que les changements apportés aux méthodes d’approvisionnement de la School Lunch Association servent aussi aux autres exploitants de services alimentaires.
Même si le laboratoire d’apprentissage de Terre-Neuve en est encore à ses débuts, ses deux réunions ont déjà fourni des possibilités inattendues en matière de collaboration créative. Par exemple, la campagne de promotion de fruits et légumes prévue par la régie de la santé Eastern Health sera reliée aux interventions du laboratoire d’apprentissage. De plus, Island Rooms’ Fishing for Success collaborera avec la School Lunch Association pour réaliser son mandat qui consiste à vivre, à communiquer et à célébrer les connaissances et la culture de la pêche traditionnelle. Ce genre de résultat est possible quand on crée des possibilités pour l’établissement de relations, l’échange de connaissances et la génération d’idées.
La transformation des systèmes alimentaires scolaires n’est pas une mince tâche. Pour y parvenir, les intervenants doivent transcender ce que la plupart des institutions et des personnes font au Canada. Le laboratoire d’apprentissage de Terre-Neuve illustre bien comment un groupe d’intervenants peut démêler des questions complexes et mettre en place les prochaines étapes à suivre. Le résultat le plus remarquable de ce processus, c’est qu’il en découle toujours des solutions innovatrices et réalisables qui sont appuyées par toutes les personnes concernées.
Pour en savoir plus :
Food First NL : www.foodfirstnl.ca (en anglais)
School Lunch Association : www.schoollunch.ca/ (en anglais)
Feuilles de renseignements sur les laboratoires d’apprentissage : www.farmtocafeteriacanada.ca/wp-content/uploads/2014/08/Learning_Lab_FR.pdf